Vente et démarchage abusif : vos droits face aux abus dans la rénovation énergétique

Pompe à chaleur à 1 €, isolation gratuite, “financement 100 % pris en charge par l’État”… Ces slogans sont devenus tristement célèbres.
Derrière ces promesses, des pratiques commerciales abusives prospèrent, particulièrement dans le domaine de la rénovation énergétique. De nombreux particuliers, souvent âgés ou vulnérables, se retrouvent piégés : contrats signés dans la précipitation, prêts dissimulés, travaux mal exécutés voire inexistants. Cet article vous explique (i) ce que dit la loi sur le démarchage, (ii) comment reconnaitre une arnaque, (iii) quels sont vos droits pour faire annuler un contrat ou un prêt et (vi) comment réagir si vous êtes victime de telles pratiques.

Maxime Gouzes

I. Démarchage à domicile ou en foire : ce que la loi encadre

A. Que faut il entendre par démarchage à domicile  

Le démarchage à domicile est un type de contrat conclu hors établissement, c’est-à-dire en dehors des locaux du professionnel. Il se définit comme une prise de contact non sollicitée, par un professionnel dans des lieux qui ne sont pas ceux où le professionnel exerce son activité de manière habituelle ou permanente. 

Les contrats conclus hors établissement incluent :

  • les visites au domicile,
  • les stands en centres commerciaux ou salons,
  • les rendez-vous à domicile suite à un appel ou un mailing publicitaire.

Dans la rénovation énergétique, les opérations concernées sont fréquentes : isolation thermique, pompes à chaleur, panneaux solaires, fenêtres, poêles à granulés, etc.

B. Quel est cadre juridique applicable à ces ventes

Le démarchage à domicile ou en salon / foire est une pratique encadrée par des règles strictes visant à protéger les consommateurs contre les abus et à garantir leur information et leur consentement éclairé. Ce cadre juridique repose principalement sur le Code de la consommation et, dans certains cas, sur le Code monétaire et financier.

En vertu de ces règles, le professionnel est  tenu à un certain nombre d'obligations positives notamment d'information (voir ci-dessous la section "vos droits en tant que consommateur démarché"). 

Par ailleurs certains pratiques sont interdites, notamment les pratiques commerciales trompeuses, définies comme des actions ou omissions destinées à induire en erreur le consommateur sur les caractéristiques essentielles d’un produit ou service, et les pratiques commerciales agressives, telles que le harcèlement, l'intimidation ou les sollicitations répétées et insistantes. Ces pratiques sont sanctionnées par une peine de 2 ans d'emprisonnement et une amende pouvant aller jusqu'aà 1 500 000 euros pour les personnes morales. 

C. Quelles sont les obligations à respecter en cas de démarchage et vente en salon

1. Obligation d'information pré-contractuelle

Avant la conclusion d’un contrat à domicile, le professionnel doit fournir par écrit des informations claires, lisibles et compréhensibles au consommateur sur le produit ou service proposé. Ces informations incluent notamment :

  • Les caractéristiques essentielles du bien ou du service.
  • Le prix unitaire des produits ou services et le prix total à payer, y compris les taxes et frais éventuels.
  • Les modalités de paiement
  • Les date ou délai auquel le vendeur s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service. Dans le cas où la commande inclut plusieurs prestations, par exemple la livraison d'un bien ainsi qu'une prestation d'installation, le vendeur doit préciser les délais de chacune des prestations attendues, à peine de nullité.
  • Les conditions de résiliation et de garanties (légales ou commerciales).
  • Les conditions de rétractation (droit, modalités et formulaire détachable). 
  • La possibilité de saisir le médiateur de la consommation compétent en cas de litige. 

Attention : Le contrat n'est pas valable s'il ne contient pas les informations requises en vertu de la loi. De plus, le vendeur à domicile qui ne respecte pas cette obligation d'information préalable encourt des sanctions pénales et administratives. 

2. Contrat écrit

Lors de la conclusion du bon de commande, le vendeur à domicile doit remettre à son client un exemplaire daté du contrat sur un support durable. Le contrat doit être signé par les 2 parties et contenir des mentions obligatoires notamment relatives à l'identité du fournisseur et aux informations précitées. 


3. Interdiction de recevoir tout paiement avant 7 jours

Le vendeur à domicile ne peut recevoir aucun paiement ou aucune contrepartie de la part du client avant l'expiration d'un délai de 7 jours, à compter de la conclusion du contrat.

Ainsi, le vendeur à domicile ne peut pas recevoir d'acomptes, de chèques ou d'autorisations de prélèvement bancaire. Il lui est également interdit d'effectuer une prestation de service avant l'expiration de ce délai.

Dans un cas comme dans l'autre, le contrat n'est pas valable si le vendeur à domicile perçoit le paiement sans respecter ce délai.

Vous souhaitez être accompagné ?

Chez Solary Avocat, nous pouvons vous accompagner dans l'analyse de votre situation et la contestation de vos factures et contrat si votre fournisseur n'a pas respecté ses obligations.

II. Vos droits en tant que consommateur démarché

A. Rétractation : 14 jours pour revenir sur votre engagement

Vous disposez d’un délai de 14 jours à compter de la signature pour annuler un contrat conclu à domicile, sans avoir à vous justifier.
Cette rétractation :

  • doit être envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception,
  • n’engendre aucun frais ni pénalité,
  • entraîne l’annulation du prêt associé, si celui-ci a été contracté dans les mêmes conditions.

💡 Si le professionnel omet de vous informer de ce droit, le délai est porté à 12 mois. En cas de contrat conclu en salon ou foire, l'offre de contrat doit par ailleurs vous informer en des termes clairs et lisibles dans un encadré apparent de l'absence de droit de rétractation. 

B. Nullité du contrat en cas d’irrégularités

Si le contrat ne respecte pas les obligations légales (absence d’informations, manœuvres frauduleuses, absence de devis conforme…), vous pouvez demander sa nullité judiciaire.

Cette nullité s’applique également au prêt associé, ce qui permet d’annuler la dette, d’obtenir des dommages et intérêts et, le cas échéant, la reprise et désinstallation du matériel livré ou installé. 

Ces solutions sont régulièrement appliquées par les juges. Ainsi, dans un arrêt du Cass. civ. 1ère, 18 septembre 2024, n°22-19.583, la Cour de cassation a annulé un contrat portant sur la fourniture et l'installation d'une pompe à chaleur et le crédit finançant cet achat après avoir constaté que le bon de commande souscrit à l'occasion d'un démarchage à domicile ne contenait pas toutes les mentions requises par la loi, notamment celle relative à la possibiltié de saisir le médiateur de la consommation en cas de litige. 

C. Droit au remboursement ou à l'indemnisation

En cas de paiement anticipé ou de travaux non réalisés, vous pouvez exiger :

  • le remboursement intégral des sommes versées,
  • des indemnités pour les préjudices subis (perte d’usage, préjudice moral, frais induits, etc.).

III. Les pratiques abusives les plus fréquentes

A. Pressions commerciales et fausses qualités

Les démarcheurs abusifs n’hésitent pas à jouer sur l’urgence et la fausse autorité pour vous pousser à signer sans réfléchir.
Leur discours est souvent bien rôdé, et repose sur des phrases types comme :

  • L’offre n’est valable qu’aujourd’hui
  • Nous sommes mandatés par l’État / la mairie / l’ANAH
  • Vous allez perdre vos aides si vous ne signez pas tout de suite

Ces affirmations sont trompeuses, voire mensongères.
Aucune prime ni subvention sérieuse ne dépend d’une signature immédiate sur le pas de votre porte. Aucun professionnel n’est mandaté “officiellement” pour vous faire signer dans l’urgence.

👉 Objectif : vous empêcher de comparer, de réfléchir, ou de demander un avis extérieur.

Autre technique fréquente : annoncer une rentabilité exceptionnelle (pour des panneaux solaires, par exemple), sans avoir effectué la moindre visite technique.
C’est non seulement absurde, mais cela viole les règles élémentaires de conseil professionnel et d’information loyale.

Dans un arrêt du 4 mars 2025, la Cour d'appel de Pau a prononcé la nullité d'un contrat de vente et d'installation de panneaux solaires conclus par un couple à l'occasion d'une foire, après avoir constaté que le vendeur leur avait garanti un rendement de 80% et une fixation en surimposition sans visite technique ni justificatif. 

B. Contrats incomplets ou opaques

L’un des pièges fréquents du démarchage abusif consiste à remettre un contrat tronqué ou rédigé de façon confuse, dans le but de désorienter le consommateur.

Concrètement, on observe souvent l’absence de :

  • formulaire de rétractation : sans ce document détachable, vous risquez de passer à côté de votre droit à annuler le contrat dans les 14 jours ;
  • conditions générales lisibles : elles sont parfois écrites en petits caractères, sur plusieurs pages non fournies, voire absentes ;
  • informations essentielles : délais de réalisation des travaux, modalités de paiement, garanties, pénalités en cas de retard… rien n’est précisé.

Pire encore, dans certains cas, un prêt est signé dans la foulée, parfois même sans que le consommateur en ait pleinement conscience.
Le commercial vous fait croire qu’il “remplit un dossier d’aide”, alors qu’il vous fait en réalité souscrire un crédit affecté auprès d’un organisme bancaire partenaire.

⚠️ Ces manquements peuvent justifier l’annulation pure et simple du contrat et du prêt.

C. Paiement anticipé : ce que la loi interdit

Lorsqu’un contrat est signé à domicile ou hors établissement, le professionnel n’a pas le droit de vous demander un paiement immédiat, que ce soit :

  • un acompte,
  • un chèque de réservation,
  • ou un RIB pour lancer un prélèvement.

Selon l’article L. 221-10 du Code de la consommation, aucune somme ne peut être encaissée tant que le délai de rétractation de 14 jours n’est pas expiré.

⚠️ Pourtant, de nombreux démarcheurs abusifs essaient de passer en force, en prétextant un “gage de sérieux”, un “montage administratif à valider”, ou encore une “avance pour réserver les aides”.

Ces demandes sont illégales. Et si un paiement a été perçu avant la fin du délai, vous êtes en droit de faire annuler le contrat dans son intégralité.

Gardez à l’esprit : aucune entreprise sérieuse ne vous demandera de payer sans vous laisser le temps de réfléchir et de vous rétracter.

IV. Que faire si vous avez été victime ?

A. Réagissez rapidement

✔️ Si vous êtes dans le délai de 14 jours : envoyez immédiatement une lettre de rétractation en recommandé avec AR.
✔️ Si les travaux sont mal réalisés ou que vous découvrez une tromperie : conservez des preuves des mal façons et adresser une réclamation écrite au vendeur ou à l'installation. 
✔️ Conservez tous les documents : devis, contrat, bon de commande, échange de mails, relevés bancaires.

B. Faites valoir vos droits

Vous pouvez :

  • contester le contrat par voie amiable ou judiciaire,
  • engager la responsabilité de l’entreprise ou du financeur,
  • signaler les pratiques auprès de la DGCCRF.

C. Contactez un avocat

Pour toutes vos démarches amiables et judiciaires, vous pouvez également être assisté par un avocat. 

Chez Solary Avocat, nous assistons les particuliers et professionnels victimes de pratiques commerciales trompeuses, notamment en matière de rénovation énergétique.

Nous vous accompagnons dans :

  • l’analyse des contrats signés à domicile,
  • la mise en œuvre de la rétractation,
  • la contestation des prêts associés,
  • et la réparation de votre préjudice.

Vous pensez avoir été victime d'un démarche abusif à l'occasion de la souscription d'un contrat de fourniture d'électricité ? Nous pouvons également vous accompagner dans la contestation de votre contrat de fourniture d'électricité ou de gaz

📎 Pour aller plus loin, voir le rapport de l’UFC-Que Choisir sur l’ampleur des fraudes à domicile. 

📩 Une question ? Contactez-nous pour une première consultation gratuite de 30 minutes.

Points clefs - Démarchage abusif : les réponses à vos questions

Peut-on annuler un contrat signé à domicile pour des travaux de rénovation ou d'efficacité énergétique (installation de panneaux solaires, isolation, pompes à chaleur) ?

Oui. Vous avez 14 jours pour vous rétracter sans motif. Ce droit est automatique et protégé par la loi. Vous devez envoyer une lettre recommandée avec AR. Si le professionnel ne vous a pas remis de formulaire de rétractation ou ne vous a pas informé de ce droit, ce délai peut être prolongé jusqu’à 12 mois. La rétractation entraîne aussi l’annulation du crédit associé au contrat.

Le professionnel m’a fait signer un prêt en même temps : que puis-je faire ?

Si le prêt est “affecté” au financement des travaux, il est juridiquement lié au contrat principal. En cas de rétractation ou d’annulation du contrat principal, le prêt est annulé automatiquement. En revanche, s’il s’agit d’un crédit classique (non affecté), la situation est plus complexe : un avocat peut vous aider à faire reconnaître la dépendance économique entre les deux contrats pour demander l’annulation conjointe.

Pourquoi faire appel à un avocat en cas de démarchage abusif ?

Les litiges liés au démarchage abusif sont souvent complexes. Il s’agit de contester des contrats, d’annuler un crédit, voire d’assigner une entreprise en liquidation. Un avocat vous aidera à (i) identifier les irrégularités, (ii) constituer un dossier solide, (iii) engager une procédure efficace pour annuler les contrats et obtenir réparation.

Dans cet article
Et si on échangeait ?

En tant qu'avocat, nous sommes là pour vous accompagner et vous conseiller au mieux de vos intérêts.