Quels sont les principes du droit de la concurrence et de la distribution ?

Un avocat compétent peut accompagner efficacement votre entreprise dans de nombreux domaines juridiques. Si le droit commercial occupe une place centrale, il n’est toutefois pas le seul à régir le fonctionnement et les interactions de votre activité. En effet, aucune entreprise n’évolue isolément sur son marché : la concurrence est non seulement une réalité économique incontournable, mais également un cadre appréhendé par le droit.

C’est précisément ce dernier aspect qui retient notre attention aujourd’hui : le droit de la concurrence et de la distribution. Comment ces deux disciplines  se définissent-elles ? Quels en sont les principes fondamentaux ? Et en quoi concurrence et distribution sont-elles intimement liées ? Explorons ces questions ensemble.

Maxime Gouzes

Droit de la concurrence et de la distribution : définitions

Le droit de la concurrence et le droit de la distribution sont complémentaires mais même si leur champ d’action coïncide très souvent, ce sont des domaines ayant chacun leurs propres enjeux et objectifs.

Définition et objectifs du droit de la concurrence

Le droit de la concurrence vise à garantir une concurrence saine et équilibrée entre les différents acteurs économiques d’un marché. Il a plus précisément vocation à prévenir et à sanctionner les pratiques anticoncurrentielles comme les abus de position dominante et les ententes illicites, par exemple.  

Ce faisant, le droit de la concurrence protège non seulement les diverses entreprises en concurrence, mais également les consommateurs, en garantissant à ces derniers un accès à une variété de produits et de services à des prix justes. En cela, il partage certains objectifs avec le droit de la consommation.

L’Autorité de la concurrence est l’autorité administrative qui joue un rôle central dans la mise en œuvre de ce droit en France. Cette institution indépendante est chargée de veiller au respect des règles de concurrence notamment en sanctionnant les comportements qui perturbent le jeu concurrentiel. Elle intervient dans les cas où une entreprise tire profit de sa puissance pour écarter ses concurrents de manière déloyale.

Le droit de la concurrence est donc issu de la volonté d’assurer une libre concurrence sur le marché, une notion primordiale pour garantir l’innovation.  

Le droit de la concurrence se retrouve également à l’échelle de l’Union européenne et des pays associés. Il y est coordonné par le Réseau Européen de Concurrence (REC ou ECN en anglais) composé de la Commission européenne, et des différentes autorités nationales de la concurrence, dont la représentante française fait bien entendu partie.

Enjeux et explications sur le droit de la distribution

Le droit de la distribution, quant à lui, encadre les pratiques commerciales et les relations contractuelles entre les différents acteurs de la chaîne de distribution. Il encadre les pratiques et les contrats mis en œuvre pour assurer la circulation des biens et services sur le marché. Ce domaine du droit joue un rôle crucial dans la structuration des relations commerciales.

Dans ce contexte, la mise en place de contrats de distribution, qu’ils soient sous forme de franchise, de concession ou de distribution exclusive, doit être minutieusement encadrée pour éviter toute violation des principes fondamentaux du droit de la concurrence comme du droit de la distribution. On maintient ainsi un marché ouvert et compétitif, tout en protégeant là encore les intérêts des consommateurs.

Les fondamentaux du droit de la concurrence

Nous avons jusqu’ici abordé l’esprit du droit de la concurrence et de la distribution. Tâchons désormais d’en voir les notions et concepts directeurs.

Quels sont les principes du droit de la concurrence ?

Tout d’abord, la libre concurrence est sans surprise un fondement incontournable du droit du même nom. La libre concurrence fait l’objet du livre IV du code du commerce français. Néanmoins pour trouver une définition explicite de la libre concurrence, c’est du côté du droit européen qu’il faut se tourner :  

Un marché où le jeu de la concurrence est libre est un marché où les entreprises, indépendantes les unes des autres, exercent la même activité et rivalisent pour attirer les consommateurs. Autrement dit, c’est un marché où chaque entreprise est soumise à la pression concurrentielle des autres.”  

De ce premier principe découle un second : la lutte contre l'exploitation abusive d'une position dominante. Cela ne signifie pas qu’il faille empêcher un acteur économique de dominer un marché. Cependant, lorsqu'une entreprise occupe une position dominante, elle est soumise à un ensemble de règles visant à prévenir les pratiques anticoncurrentielles, et notamment les abus dans l'exploitation de sa position dominante pour évincer des concurrents. Nous reviendrons plus en détail sur ces pratiques et leurs implications.

Autre principe en lien avec la libre concurrence : la protection du consommateur. En effet, en veillant à une concurrence loyale entre les entreprises, le droit de la concurrence est censé permettre aux consommateurs de bénéficier de produits de meilleure qualité à des prix en rapport avec le produit livré ou le service presté. Le droit de la concurrence veille ainsi à la protection de l'intérêt public et des intérêts individuels.

Les types de pratiques anticoncurrentielles

Les pratiques anticoncurrentielles peuvent généralement être classées en deux grandes familles : les ententes, d'une part, et les abus de position dominante, d'autre part.

Ententes commerciales

Le droit de la concurrence interdit plusieurs comportements jugés nuisibles au bon fonctionnement du marché. Ainsi, les ententes entre concurrents, qu’elles soient explicites ou tacites, sont sévèrement sanctionnées. Une entente est caractérisée par une concertation entre plusieurs entreprises qui décident ensemble des pratiques et comportements qu’elles souhaitent adopter, au lieu de concevoir leur stratégie commerciale de façon indépendante. Il peut s’agir d’entente sur les prix ou pour se partager un marché. De telles ententes nuisent :  

  • aux entreprises concurrentes ne faisant pas partie de l’entente ;
  • aux entreprises qui voudraient accéder au marché ;
  • aux consommateurs, qui ne peuvent plus pleinement faire jouer la concurrence et se retrouvent donc avec des prix imposés.  

A titre d'illustration, en décembre 2018, l'Autorité de la concurrence a infligé une amende de 189 millions d'euros à un cartel impliquant six grands fabricants d'électroménager. Ces entreprises s'étaient entendues pour augmenter les prix de l'ensemble de leurs gammes de produits, touchant ainsi des équipements de base des ménages tels que réfrigérateurs, congélateurs, lave-linge, lave-vaisselle, et fours. Environ 70% du marché était affecté par cette entente. Par exemple, une hausse de prix de 50 euros avait été décidée pour les produits coûtant plus de 400 euros.

Abus de position dominante

Contrairement aux ententes, qui sont des pratiques bilatérales ou multilatérales, les abus de position dominante émanent d'un seul opérateur qui use de sa position de force sur un marché pour le verrouiller, évincer ses concurrents ou empêcher l'arrivée de nouveaux entrants.

L’abus de position dominante n’est pas tant une pratique qu’un ensemble de pratiques dangereuses pour la libre concurrence. Parmi celles-ci, on peut notamment lister les suivantes :

  • Prix prédateurs ;
  • Refus de vente ou d’accès à un marché ;
  • Imposition d’exclusivité ;
  • Conditionnement d’une vente à une autre vente ;
  • Abus d’avantage concurrentiel, etc.

Les abus de dépendance économique

L’abus de dépendance économique désigne une pratique anticoncurrentielle où une entreprise exploite abusivement la situation de dépendance économique de l’un de ses clients ou fournisseurs.

Pour qu’un tel abus soit caractérisé, trois conditions cumulatives doivent être réunies :

Une dépendance économique

Une entreprise est en état de dépendance économique lorsqu’elle ne dispose pas, dans des délais raisonnables, d’une alternative techniquement et économiquement équivalente à sa relation commerciale avec un partenaire.

Ce critère est évalué in concreto, en tenant compte notamment :

  • De la part de marché de l’entreprise dominante ;
  • De l’importance de cette entreprise dans le chiffre d’affaires de son partenaire ;
  • De la notoriété de sa marque ou de son enseigne ;
  • De l’existence d’autres solutions viables.

💡 Exemple : Un distributeur dont l’essentiel du chiffre d’affaires provient d’un seul fournisseur ne sera pas automatiquement considéré comme dépendant. Il faut prouver qu’il n’a pas d’autres solutions viables.

Une exploitation abusive de cette dépendance économique

Une entreprise en position dominante commet un abus si elle impose à son partenaire des conditions manifestement déséquilibrées ou anormales, telles que :

  • Un refus de vente injustifié ;
  • Des pratiques discriminatoires ;
  • Des déréférencements arbitraires ;
  • Une renégociation unilatérale des conditions commerciales sans contrepartie.

Une atteinte au fonctionnement du marché

L’abus doit avoir une incidence sur la concurrence, qu’elle soit réelle ou potentielle. Aucun seuil minimal de part de marché n’est requis pour établir cette affectation.

💡 Exemple : Si une grande enseigne de distribution impose des baisses de tarifs unilatérales à ses fournisseurs, au point de les fragiliser financièrement, cela peut affecter la concurrence.

Les sanctions et mesures correctives

En cas de pratiques anticoncurrentielles , l’Autorité de la concurrence dispose d’un arsenal de sanctions pour y mettre fin. Les amendes peuvent être très élevées et sont calculées en fonction de la gravité des faits et de la capacité financière de l’entreprise incriminée. Dans certains cas, des décisions administratives peuvent être imposées, comme l’obligation de céder certaines activités ou de mettre fin à une pratique jugée anticoncurrentielle.

L’objectif des sanctions n’est pas seulement punitif, mais aussi dissuasif. Il s’agit de montrer que les pratiques anticoncurrentielles ne seront pas tolérées et que toute tentative de fausser la concurrence sera sévèrement réprimée. Par ailleurs, dans des cas extrêmes, des entreprises peuvent être démantelées ou contraintes de revoir totalement leur organisation commerciale.

Étapes autorité de la concurrence
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Les éléments-clés du droit de la distribution

Les principaux contrats de distribution

Le contrat de concession permet à un fournisseur de confier à un distributeur l’exclusivité de la vente de ses produits sur un territoire donné. Le distributeur s’engage en retour à respecter certaines obligations en matière de promotion et de vente des produits. Ce type de contrat est fréquemment utilisé dans des secteurs comme l'automobile, les cosmétiques ou encore les équipements industriels.

La franchise est une autre forme de contrat très répandue, dans laquelle une entreprise, appelée le franchiseur, accorde à une autre, le franchisé, le droit d'exploiter son concept commercial, incluant souvent une marque, un savoir-faire et des méthodes éprouvées. En contrepartie, le franchisé s'engage à respecter les directives du franchiseur et à verser des redevances (souvent sous forme de droits d’entrée et de royalties).

Ce modèle de distribution est largement répandu dans divers secteurs, tels que la restauration, le commerce de détail, ou les services. Il permet une croissance rapide pour le franchiseur tout en offrant aux franchisés un cadre sécurisé pour développer leur activité.

Enfin, les contrats de distribution exclusive ou sélective sont également très courants. La distribution exclusive confère au distributeur des droits exclusifs sur un territoire, tandis que la distribution sélective impose des critères stricts de sélection pour que seuls certains revendeurs puissent proposer les produits en question.

La réglementation liée aux pratiques de distribution

La réglementation des pratiques de distribution en France vise à protéger à la fois les distributeurs et les fournisseurs, mais aussi à maintenir un marché concurrentiel. Les pratiques commerciales telles que les clauses de non-concurrence et d’exclusivité sont ainsi strictement encadrées par la loi pour éviter tout déséquilibre significatif.

Dans le cadre des réseaux de distribution, le respect des règles de la concurrence est primordial. Toute clause contractuelle qui pourrait restreindre la concurrence et critères de sélection doivent être justifiés par des raisons objectives et proportionnées.

Les sanctions

Comme dans le droit de la concurrence, les pratiques de distribution contraires à la loi entraînent des sanctions. L’Autorité de la concurrence peut infliger des amendes pour tout comportement déloyal ou anticoncurrentiel. De plus, les tribunaux de commerce peuvent invalider les contrats ou clauses jugés abusifs, en particulier lorsque ceux-ci créent un déséquilibre significatif entre les parties.

Concurrence et distribution : une grande interactivité

Acteurs droit de la concurrence

Comment le droit de la concurrence influence les accords de distribution ?

Bien souvent, le droit de la concurrence a un impact direct sur les accords de distribution. À titre d’exemple, les contrats de distribution exclusive doivent respecter les principes de libre concurrence pour ne pas aboutir à des situations de monopole. De même, la distribution sélective doit être justifiée par la nature des produits et ne doit pas servir de prétexte à une exclusion voire une éviction des entreprises concurrentes.

Evolution des relations entre fournisseurs & distributeurs sous l'angle du droit de la concurrence

Les relations entre fournisseurs et distributeurs doivent s’opérer dans le respect des règles de concurrence pour éviter tout déséquilibre ou impact sur le marché. Les règles encadrant la validité des clauses d'approvisionnement exclusif en sont un bon exemple. Ces clauses ne sont ainsi valables que si les parts de marché détenues par le fournisseur et l’acheteur ne dépassent pas 30 % du marché en cause, qu’aucune restriction caractérisée ne figure dans l’accord exclusif et que l’obligation est prévue pour une durée maximum de cinq ans. Au-delà de cette durée, les juges détermineront dans le cadre d’une analyse individuelle si (i) la clause est accessoire à l’opération et (ii) si sa durée et son champ d’application matériel et géographique sont proportionnés et n’excèdent pas ce qui est nécessaire à sa réalisation (Trib. UE, 24 mai 2012, MasterCard, aff. T-111/08)

En définitif, si on parle parfois de “jeu de la concurrence”, celui-ci est régit par un ensemble des règles issues notamment du droit de la concurrence et de la distribution.

Le droit de la concurrence donne les principes fondateurs (libre concurrence, équilibre des intérêts de tous les acteurs) et le droit de la distribution le précise dans le domaine de la distribution. Tous deux prévoient un certain nombre de sanctions mais c’est l’Autorité de la concurrence qui est principalement chargée de veiller au respect des règles issues du droit de la concurrence.

Les avocats ont aussi plusieurs rôles à jouer dans ce cadre : du conseil juridique à la représentation en passant par la rédaction contractuelle. Leur expertise permet aux entreprises de naviguer dans des environnements juridiques complexes et de prévenir les risques qui pourraient compromettre leur activité, tant à l'occasion de la structuration de leur activité et la négociation de leurs contrats qu'à l'occasion de litiges ou de contrôles administratifs.

Chez Solary Avocat, nous sommes toujours prêts à défendre vos intérêts avec rigueur et détermination, indépendamment de la complexité de l’affaire. Contactez-nous pour en savoir plus.

Points-clés : Droit de la concurrence et la distribution

C’est quoi la concurrence en droit ?

En droit, la concurrence désigne l’ensemble des règles juridiques qui encadrent les interactions entre les entreprises sur un marché, afin de garantir un jeu économique équilibré, loyal et bénéfique pour les consommateurs. Elle repose sur des règles visant à prévenir et sanctionner les comportements susceptibles de fausser cette compétition naturelle entre acteurs économiques. Le droit de la concurrence protège ainsi les acteurs du marché et les consommateurs en assurant un environnement économique juste et compétitif.

Quelles sont les 3 conditions de la concurrence ?

Les trois conditions de la concurrence sont : la liberté d'entrée sur le marché, permettant à toute entreprise de s'y implanter ; la transparence, assurant un accès équitable aux informations sur le marché ; et la diversité des offres, où plusieurs entreprises proposent des produits ou services similaires, permettant aux consommateurs de choisir librement en fonction de leurs préférences.

Quelles sont les principales juridiques de la distribution sélective ?

Les trois formes juridiques de la distribution sélective sont : la franchise, où le franchisé exploite une enseigne selon les conditions du franchiseur ; la concession, où le concessionnaire obtient des droits exclusifs sur un territoire pour vendre les produits du concédant ; et la distribution sélective qualitative ou mixte, où les distributeurs sont sélectionnés sur la base de critères qualitatifs objectifs et non discriminatoires, éventuellement complétés de critères quantitatifs (nombre de distributeurs sur un secteur donné, déterminé par exemple par rapport à la taille du marché local). Toute distribution sélective, notamment quantitative, peut être perçue comme une restriction injustifiée à l'accès au marché et doit par conséquent être justifiée par des considérations objectives et légitimes.

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Et si on échangeait ?

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